Citation :

*Fais comme tu le sens. Suis ton instinct. Et sors ce tuyau d'arrosage de ta bouche.*

Voilà les conseils que Tonton Kitora lui avait donné à ce sujet. Quel sujet? Le familier, bien sur. Ce familier qui, chez lui, était un sylvin dans son jardin, donnant de très étrange fruits et des coups de branche quand Ryu' essayait de le manger. C'était d'ailleurs l'une des rares choses qu'il n'avait pas le droit de boulotter. Le familier de Tonton Kitora. Parce que s'il venait à disparaître, ce serait comme si Ryusaki lui avait mangé un bras : Il y aurait plein de trucs qu'il ne pourrait plus faire, et donc, il serait tout triste. Et Ryu' n'avait pas envie que son tonton soit tout triste. Il fallait donc, s'il voulait goûter un familier, qu'il en invoque un lui même. Et il n'y avait qu'un seul endroit où il pouvait effectuer cette manoeuvre : à Tadakai.

Uniforme fraichement acquis et enfilé (avec une manche fraichement déchirée et digérée), le jeune garçon s'attela à relire la note qu'il avait marqué au sujet de l'invocation du familier. Cherchant dans sa poche la petite feuille sur lequel il avait marqué les consignes. Très vite, il retrouva un petit papier. Qu'il croqua, par réflexe. Le papier n'avait en lui même aucun goût. Une texture plutôt élastique, et un très léger parfum assez corsé. Mais à bien y réfléchir, ce parfum provenait de l'encre sur la feuille, pas de la feuille elle même. Une minute. L'encre! S'il y avait de l'encre sur cette feuille, c'est que c'était peut-être ses notes sur l'invocation de familier!

Citation :

Etapes pour l'invocation de familier.

1) Garder en mémoire qu'il ne faut pas manger cette feuille. Oui, cela parait évident, mais on ne sait jamais avec t

Et le papier s'arrêtait là. Enfin, plutôt, ce qui restait du papier. Bon bah tant pis. Il fallait y aller au feeling. Faire ce qu'il sentait juste. Suivre son intuition. Et son intuition lui disait... De manger le reste de la feuille. Bah, après tout, ce bout de feuille ne servait plus à rien, alors autant le faire disparaître. Son intuition lui disait ensuite que ce n'était pas son intuition qui parlait, mais plutôt son estomac à l'heure actuelle. Zut. C'est l'intuition qu'il faut écouter. Pas l'estomac. Pas les trucs reliés à mettre des trucs dans sa bouche. Ca ça vient du mauvais endroit. Non. Suivre son instinct. Fermer les yeux, et chercher l'endroit le plus propice à l'invocation de son familier. Car s'il pouvait avoir plus de chance de l'invoquer à un endroit, cet endroit l'attirerait. Il ne fallait pas qu'il se fie à ses cinq sens (et surtout pas à son goût) mais à son sixième sens. Ne pas regarder avec les yeux, mais avec son esprit.

Et l'on vit un jeune garçon rentrer tête la première dans un mur alors que l'entrée du grand hall était juste à côté et qu'il fallait vraiment être aveugle pour la rater.

Bon. Peut-être se fier un tout petit peu à ses yeux quand même, mais pas plus. Et ignorer les élèves qui gloussaient et qui le regardaient. Bientôt, il aurait un familier qui leur fera palir de jalousie. Ou un familier qu'il aurait grignoté entre deux cours. Les deux options semblaient bonnes. Ses pérégrinations l'ont conduit devant un escalier. Qu'il monta. Un étage. Un seul étage était suffisant. Quelque chose l'attirait dans ce premier étage, et qui lui disait de rester. Surement la flemme d'en monter un autre ou le fait que redescendre alors qu'il venait de monter serait du gaspillage d'actions. Avancer, donc, tranquillement. Et s'arrêter brusquement. Parce que là, il y avait un autre mur et que s'il ne tournait pas ou ne s'arrêtait pas tout de suite, il allait se le prendre dans la figure comme tout à l'heure. Et ça c'était pas bien. Généralement.

Il y avait une porte, pas loin. Menant à une salle de classe. Vu le calme qui y règne et l'absence totale de bruit, Ryu' déduisit que c'était pas l'heure des cours et qu'il n'y avait probablement personne dedans. Autant ouvrir la porte et entrer dans la salle. Non, pas avec la bouche. Avec la main. Parce que s'il mangeait la poignée et que c'était une porte qui se tirait, il n'aurait plus aucun moyen de l'ouvrir. Ryusaki s'était déjà fait avoir plusieurs fois comme cela, restant bloqué dans une pièce sans pouvoir sortir. C'est tout de même vachement difficile de mordre dans une surface totalement plane, fallait ouvrir la bouche au maximum et risquer de se déloger la mâchoire. Toujours est-il que, dans cette salle de classe, quelqu'un était déjà présent...

"Sawasdee-krub!"

"Vuip, c'est moi! Enchanté!"

Ahun. Un coup d'oeil à la salle de classe, et une table au fond attira particulièrement son attention. Des ustensiles de cuisine et différents ingrédients trainaient par ci par là sur la table. Cela tombait bien, il avait un petit creux. Cependant, ce n'était pas vraiment le moment de casser la croute. La madame en face de lui lui avait bien spécifié qu'elle était professeur d'anglais, et qu'elle était là pour le guider pour le rituel de l'invocation de familier. Sauf que voilà. Si elle le guidait, il ne pourrait pas suivre son instinct mais les conseils de la madame à la place. Donc, ce serait peut-être plus son familier à elle que le sien. Cependant, là tout de suite, son instinct lui disait d'aller croquer dans la porte d'entrée de la salle. Et il était fort peu probable que le fait de faire un trou en forme de dentition dans la porte ait un quelconque impact sur l'invocation de son familier. A priori. Quoique. On ne savait jamais tant que l'on n'avait pas essayé après tout. Sauf qu'on lui avait posé des questions avant qu'il ne passe à l'acte.[/color]

"Comment je me sens? Euh... J'ai faim."

Forcément. Inutile de préciser que la faim était ce qui motivait le jeune garçon à faire tout ce qu'il faisait chaque jour. Et c'était cette faim qui le rendait si insouciant. Si décontracté. Puisque le seul problème qu'il avait en tête était la manière dont Ryusaki allait se sustenter, et que cette solution se trouvait partout autour de lui. Donc, ce problème n'en était pas un. Donc, par conséquence, Ryusaki n'avait jamais aucun problème. Ou du moins, si quelque chose lui faisait oublier qu'il avait faim, c'est que vraiment, ce serait très grave.

"Comme question... Euh... Voui, j'en ai deux ou trois. La première, par quoi on commence? Vais déjà faire de la place, je sens qu'on va en avoir besoin."

Se dirigeant vers la table la plus proche, Ryu' se mit en tête de pousser toutes les tables contre les murs et les fenêtres. Sauf que voilà, ces tables étaient trop lourdes pour lui, et à chaque fois qu'il poussait, la table en question n'avançait à peine que de quelques centimètres. Cela allait prendre un temps fou à tout déplacer et à tout enlever. Cependant, tout en s'attelant à la tâche, Ryu' posa sa seconde question.

"Et comment saviez-vous qui j'étais, et que j'allais venir ici? Elle est magique cette école. Les profs savent où les élèves vont faire leur rituel avant même qu'eux-même ne le sachent. Moi j'ai juste senti que c'était ici que je devais le faire. Je sais pas pourquoi. Ce lieu m'a attiré."

Ou alors, c'était juste que le terrain avait été préparé à l'avance et qu'il avait rendez-vous dans cette salle pour son rituel, et qu'il l'avait complètement oublié. Si c'était le cas, le hasard faisait tout de même vachement bien les choses. La seule chose que le hasard avait mal fait, c'était le poids de ces foutues tables que le petit blondinet n'arrivait pas à déplacer. Enfin, si, mais il galérait. Bon. Une table de collée contre le mur. Plus que... Plein. Trop. Et Ryu' était déjà fatigué. Cela s'annonçait mal.

"Pis troisième question..."

Le jeune garçon retourna près de la ravissante professeur d'anglais. On voyait l'hésitation se lire sur son visage, s'il devait vraiment poser cette question ou pas, mais il fallait tout de même qu'il se lance à l'eau. Qui ne tente rien n'a rien. C'est ainsi que Ryusaki posa un genou à terre, regardant la demoiselle en rougissant légèrement.

"Mademoiselle Noriiko Shimazu... Puis-je avoir l'honneur de vous demander votre main?"

Bon, la formulation n'était pas vraiment correcte, mais l'essentiel du message était là. Le ton employé était certes légèrement hésitant, mais qui ne serait pas hésitant avec une demande pareille? Non, ce n'était pas une blague. Cela pouvait se lire dans ses yeux. Il n'y avait pas l'ombre d'une moquerie dans le sourire du jeune garçon qui avait plein d'étoiles dans les yeux. On pouvait sentir à quel point notre blondinet était sérieux. En particulier quand, cinq secondes plus tard, Ryusaki avait clarifié ses dires.

"Ma maman m'a appris que c'était une question de respect de demander aux gens avant de leur croquer dedans parce que certaines personnes veulent pas. Pis si je fais un gros trou dans votre main, y'aura plein de sang partout, ce qui sera bien pour notre rituel non?"

Et l'on pouvait ainsi expliquer le fait qu'il se soit mis à genoux et le fait qu'il ait rougi en posant la question par le fait qu'il était épuisé après avoir déplacé une table.

Un grondement derrière Ryusaki le fit se retourner vers la salle. C'était le choc de la dernière table contre les murs. Apparemment, les amis de la demoiselle que Ryu' ne pouvait apparemment pas voir avaient fini de déplacer les tables pour faire de la place. Curieux... Le jeune garçon se demandait quel goût pouvaient avoir ces esprits. Parce que une force qui ne pouvait pas se voir, généralement, la seule chose qu'il avait vu, c'était le vent. Et le vent n'avait pas beaucoup de goût. Mais il n'était pas très fort non plus. Or, ces esprits pouvaient avoir assez de force pour soulever et déplacer des tables. Par conséquent, ils pouvaient peut-être avoir le goût du vent, mais en beaucoup plus fort aussi?

Ahun. La madame s'était mise à rire face à sa demande. C'était rare que l'on se mette à rire. Peut-être que la façon dont il l'avait demandé pouvait porter à confusion. Cependant, ce qu'il avait demandé était pourtant clair. Clair et sérieux. Tout ce qu'il voulait, actuellement, était sa main. Peut-être éventuellement accompagné d'un peu de poivre. Ryusaki en voyait sur la table du fond. La viande crue se marie généralement bien avec du poivre. Et c'est là que la demoiselle répondit. Une réponse qui, à son tour, fit éclater de rire le jeune garçon. Peut-être que le fou rire était contagieux, mais ce n'était pas la principale raison de son éclat. Pour lui, la réponse actuelle de la dame était tout aussi dénué de sens que sa demande pour elle.

"Pas comestible? Voyons. Bien sur que vous êtes comestible. Tous les gens le sont. Vous n'avez jamais essayé de vous manger, pas vrai? Ce n'est pas que je ne peux pas vous manger, mais plutôt que vous ne voulez pas que je vous mange, n'est-ce pas?"

Comme pour prouver ses dires, et démontrer la comestibilité de la demoiselle, Ryusaki pointa de son index gauche la demoiselle. Cependant, ce n'était pas la demoiselle qui devait se sentir visée par ce doigt, mais plutôt, le doigt en lui même qui avait de l'importance. Car quelques secondes plus tard, Ryusaki mordit le bout de son propre doigt, faisant un petit trou et ne laissant plus que quelques millimètres avant que la phalange distale ne soit visible. Puis il repointa ce doigt ensanglanté devant la demoiselle.

"Vous voyez? Moi même, je suis comestible. Voulez gouter? Je... AAAAAAAAAAAAARGH! J'AVAIS OUBLIE QUE CA FAISAIT MAAAAAAAAAL!"

Et Ryusaki se mit à courir partout en pointant son index ensanglanté en l'air et en criant. Il dut au moins faire trois fois le tour de la salle dans cet état. Cependant, en plein milieu de sa course, la douleur avait provoqué un réflexe dans son cerveau, la libération de plus d'adrénaline, pour calmer le tout. Ce qui nécessitait de l'énergie. Ce qui augmenta sa faim. Suffisamment pour qu'il ne pense plus à la douleur de son doigt. Ce qui fait que Ryu' s'arrêta d'un coup, s'immobilisa, et le fit réfléchir. Et parler.

"Hmmm... J'crois que j'ai faim. Et que ça arrangera pas mon doigt si j'continuais à crier, en fait. Et encore moins mon estomac. Bon. Finissons-en avec ce rituel et allons manger. Bon, ben, c'est à moi de mettre plein de sang partout alors. Si je dois suivre mon intuition, je sens que je dois dessiner avec du sang."

Ryu' s'assit dans un coin en commençant à appliquer sa blessure sur le sol, tout en gémissant de douleur de temps à autres. Mais on sentait dans son regard qu'il s'appliquait. Un petit peu par ci, un petit peu par là, un petit bout ici, un chouïa par là et voilà! C'était très grossièrement dessiné et assez difficile à comprendre, mais on pouvait voir devant le petit garçon un poney chevauchant un stylo ailé qui écrivait des arc-en-ciels. Enfin, c'était l'interprétation du jeune garçon. Assez abstrait tout de même. Ou surtout mal dessiné. Sauf que Ryusaki avait oublié un petit détail.

"Ah mince, j'ai oublié le rituel! J'crois pas que ça fera quoi que ce soit de dessiner des petits poneys avec du sang. C'est quoi en fait, les figures magiques généralement qui ont le plus de potentiel magique?"

Ryusaki haussa un sourcil. Apparemment, cela semblait plus repousser la demoiselle qu’autre chose. Elle n’avait aucune envie de goûter son doigt, et son envie de rire semblait bien passée après cette petite démonstration. Mais cela importait peu. A vrai dire, le plus important à ce moment là était de faire ce rituel et d’en finir au plus vite. La prof d’anglais commença à conseiller une étoile à cinq branches. Ou un croissant de lune. C’était intéressant, comme concept. Cependant, à bien y réfléchir, l’étoile à cinq branches était selon lui peu… Attirante. Si un pentacle pouvait aider à invoquer un familier, cela voulait dire que plus la figure était complexe mais exacte, plus son potentiel magique serait augmenté en théorie. Alors, pourquoi ne pas augmenter la difficulté et y aller avec une étoile parfaite à plein de branches? Le jeune garçon acquiesça, et commença à tracer sur le sol un grand cercle de sang. Parce que toute construction commence par un cercle, et de toute façon, si le croissant de lune amplifiait la magie, le cercle parfait, la pleine lune, ne devrait pas être négative non plus.

“Une étoile à cinq branches hein? J’aime pas le chiffre 5. Je sais pas pourquoi. Si je suis mon intuition, plus une étoile a de branches, plus elle est puissante hein? On va essayer avec 7! Ou plus, j’vais faire un truc au pif, et pis si ça fait une étoile, c’est tant mieux! Mon pouvoir? Ben... euh... Je peux tout manger!”

Tout en parlant, Ryusaki divisa le cercle en quatre parts égales. Mais son estomac commençait à sérieusement lui dire de manger quelque chose. Il y avait sur la table plein de trucs. Dont une petite coupelle en porcelaine avec dessus un abricot. Ooooh. C’est bon les abricots. Le jeune garçon en raffolait. Comme pas mal de choses d’ailleurs. Deux secondes de contemplation de ce fruit, avant de… le poser au sol, à l’une des intersections du cercle et des lignes. Et de croquer la coupelle, comme si c’était un cookie aux abricots. Mais sans abricots vu que l’abricot était posé sur le cercle. Après tout, s’il aimait les abricots, donc, son familier sera peut-être attiré par les abricots aussi, et ça rendrait l’invocation plus facile! Et comme il y avait plein de fruits sur la table, bah… Une banane sur la seconde intersection. Parce que comme ça, s’il est invoqué et qu’il essaye de s’enfuir, le familier glissera dessus et tombera et on pourra le rattraper avant qu’il se désinvoque.

Bon. Fallait quand même mettre des trucs à l’intérieur. Une cerise, par exemple. Que Ryusaki posa à peu près au centre, sur la ligne centre/banane, de sorte que la ligne centre/cerise fasse environ un quart de la ligne centre/banane. Et avec son index, il traça la ligne cerise/abricot. Ca faisait toujours mal mais fallait supporter. Mais le triangle formé par le centre, la cerise et l’abricot était pas joli selon ses critères. Genre, l’angle centre/cerise/abricot était pas bon. Aussi prit-il le soin de tracer une ligne entre la cerise et un point de l’axe centre/abricot, et poser une datte dessus, de sorte que l’angle centre/cerise/datte soit à peine un quart de l’angle centre/cerise/abricot. Non. C’était pas super non plus. Fallait un angle plus grand, pas plus petit, en fait. C’est ainsi que Ryu’ traça quelque chose qui ressemblait à la moitié d’un angle droit de l’axe datte/cerise, et lorsque ça avait coupé le diamètre centre/abricot, le jeune garçon posa dessus une échalote. Pour repousser les méchants vampires s’ils voulaient faire croire qu’ils étaient des familiers.

“Ah mince, le croissant de lune!”

Et Ryusaki commença à tracer un grand cercle de diamètre échalote-abricot. Puis il posa une figue sur l’intersection entre le cercle et l’axe cerise/banane. De même, il traça un cercle de centre datte et passant par la figue. Ca y est, ça faisait un croissant de lune! Mais revenons à notre figure. Ce dernier cercle de centre datte coupait aussi des lignes. Donc, autant mettre une groseille sur l’intersection de ce cercle avec la ligne centre/abricot. A coté de l’échalote parce qu’elle se sentait seule. Puis une belle ligne de sang bien parallèle à l’axe centre/banane et passant par la groseille. Ce qui coupait… Pas grand chose en fait, vu que avec tout ce qu’il avait tracé, il n’y avait plus de sang dans son doigt. Mince alors. Retour à la table pour manger un concombre et une fourchette en passant, et prendre le gros pot de nutella parce que ça avait l’air cool pour tracer des lignes. Donc, où il en était… Ah oui. L’intersection entre la ligne parallèle juste tracée et le cercle original. Sur lequel il posa un bout de nutella. Puis tracer la ligne Nutella/Abricot.

Oooh, cette ligne faisait exactement la taille de Ryusaki! Ca c’était un signe qu’il était sur la bonne voie. Autant continuer à tracer des lignes qui faisaient sa taille, qui partaient du point précédent et qui coupaient le cercle! Cela prit un petit moment et pas mal de nutella pour tracer tout cela, mais le résultat était là. 17 lignes. Ca formait une étoile à 17 branches. Si avec ça, il loupait son invocation, ce serait… Ce serait… Ce… Ryusaki s’effondra alors sur le sol. A force de dessiner avec son sang, la plaie ne se refermait pas, et donc, avec tout ce qu’il a tracé et tout ce qu’il a fait, il était évident qu’il avait perdu un peu trop de sang. Ce qui fit qu’il était complètement out, que l’adrénaline était tombée et que…

“ C’que… j’ai… Faim…”

Bonus : dessin réalisé:

"Nyaaaah..."

Inutile de dire, mais beaucoup d'hommes auraient payé cher pour être à la place de Ryusaki à ce moment précis. Certes, avoir perdu un peu trop de sang et avoir une faim débordante n'était absolument pas des détails négligeable, cependant, non seulement, le jeune garçon était posé la tête sur les genoux de la demoiselle, ce qui était absolument confortable, mais en plus, il avait du chocolat! Du bon chocolat au lait alpin finement sucré. Un véritable délice, et exactement ce qu'il lui fallait nutritivement pour récupérer d'un trop plein de sang perdu. Certes, ce n'était pas un effet immédiat, mais la quantité de sucre ingérée commencerait à avoir des résultats significatifs au bout de quelques minutes. Et pendant qu'il grignotait la tablette de chocolat, petit bout par petit bout, la madame lui avait posé une question bien étrange.

"Si je mangeais... Une partie de votre bras?"

Il fallut tout de même quelques secondes de réflexion au jeune garçon avant de pouvoir formuler une réponse correcte. Après tout, il n'était jamais vraiment tombé dans cette situation, donc, il y avait plusieurs possibilités, et Ryusaki réfléchissait à laquelle semblait la plus plausible. Donc, écarter la possibilité qu'en mangeant son bras, il se transforme en poisson rouge.

"Oui... Et non. Oui parce que à mon avis, votre bras est plein de protéines et de sang, et que le fait d'en avaler ferait que cela aiderait un peu en allant une partie dans l'organisme, remplaçant ce que j'ai perdu. Et non parce que la quantité qui va réellement aller dans mon propre sang sera si petite que j'pense avoir besoin du bras entier pour que je puisse sentir un quelconque effet. Et j'suppose que, comme tout à l'heure, vous n'avez pas vraiment envie de tester."

Bon. Cela semblait aller un peu mieux. Essayant de se relever, le jeune garçon eut du mal à retrouver son équilibre et préféra finalement rester à quatre pattes. Au moins, s'il tombait de cette hauteur, ce ne serait pas un problème. Même si la madame lui disait de se reposer, il y avait un problème plus gros que son anémie actuelle ou son mal de tête : sa faim. Se dirigeant donc vers la table avec nourriture en rampant à quatre pattes, le jeune garçon s'agrippa sur une chaise en bois et... La fit basculer. Bon, c'est pas maintenant qu'il se relèverait, mais ce n'était pas grave. La chaise avait maintenant les pieds à la hauteur du jeune garçon, qui croqua directement dans l'un d'entre eux.

Tiens? Cela ne craquait pas comme d'habitude, la sensation était plus friable que les lamelles habituelles. Ce n'était pas du vrai bois, on dirait, mais plus du bois broyé, recyclé et compressé. Bah, ça restait quand même du bois, plein de fibres. Mais cela manquait quand même de quelque chose. Se mettant à genoux, Ryusaki vit sur la table ce qu'il lui fallait, des tranches de jambon. Il en prit une et l'enroula autour du pied de la chaise qu'il avait commencé à attaquer, et croqua à nouveau dedans. Ah, ça allait beaucoup mieux désormais. Bien salé et bien consistant. Il restait trois pieds à cette chaise, mais ça tombait bien, il restait trois tranches de jambon. Le jeune garçon commença à enrouler ce jambon autour du second pied, avant de se retourner vers son professeur d'anglais.

"'Voulez goûter?"

"Bon ben... Comme vous voudrez."

D'un haussement d'épaules, Ryusaki détourna son attention du professeur d'anglais pour revenir sur sa chaise. Après tout, si elle n'en voulait pas, ça fera simplement plus pour lui. Du jambon au pied de chaise, ça c'était une délicate combinaison qu'on ne risquait pas de voir ailleurs. On parle bien de jambon cru italien, de jambon au melon de pays, mais jamais de jambon au pied de chaise. Peut-être mourra-t-il seul en emportant le secret de ce goût dans la tombe, sans avoir jamais partagé la recette qui lui était pourtant unique. Mais pour l'instant, le jeune garçon n'avait aucun regret et se contentait de continuer à manger ce bout de chaise. Et d'apprécier délicatement sa nouvelle trouvaille culinaire. Cela faisait du bien de manger, d'avoir quelque chose dans l'estomac. Cependant, au lieu de manger un troisième pied, le jeune garçon fut interrompu. Ah, c'est vrai. Il n'était pas seul, et il était là pour pouvoir accomplir un rituel. Ryusaki se leva alors. Il avait maintenant assez de forces pour se lever, même s'il avait du mal à tenir correctement debout sans tanguer un petit peu.

"N'avez raison, je vais m'y mettre! Euh..."

Sauf que Ryusaki n'avait aucune idée de la suite de l'invocation. Après tout, il n'y avait pas de livre associé à l'invocation de familier, chacun avait sa propre méthode, chaque familier devait être invoqué de façon différente. Il fallait donc qu'il trouve comment le faire, et comment le faire seul. Donc, suivre son instinct, qui lui disait de tester un peu n'importe quoi. Après tout, qui ne tente rien n'a rien, et en l'occurrence, le jeune garçon se fichait un peu de quel familier il allait avoir, tout ce qu'il voulait était d'avoir un familier. Parce qu'en fait, il n'avait aucune idée de ce qu'était réellement un familier. Genre, le chat de la madame qui semblait dormir? Bon. Autant tester.

"Apparais, familier!"

Un vent souffla alors dans la pièce. Mais ça, c'était juste parce que la fenêtre était ouverte, et qu'il y avait une porte d'ouverte qui faisait un petit courant d'air. Aucune réaction de la part du cercle. Trois secondes de silence absolu où rien ne se passa. Ca devait pas être la bonne formule.

"Viens à moi, être de magie?"

Aucune réaction, mis à part la fenêtre qui claquait un peu contre le rebord. Bon. Il fallait désormais trouver ce qui clochait. Peut-être qu'il fallait prononcer une incantation. Or, n'ayant jamais eu de cours de magie, le jeune garçon ne connaissait absolument pas d'incantation. Mais ce n'était pas grave. C'était à la portée de tout le monde, de pouvoir invoquer un familier. Y compris à des centaines d'élèves qui venaient d'arriver et qui n'avaient aucune idée de comment marchait réellement la magie avant d'arriver. Donc, autant dire les premières choses qui lui venaient à l'esprit. Ryusaki ferma les yeux et plaça ses mains en prière, avant de se concentrer.

"Pom... Dé ranett... Y... Pom... Da pi... Ta... Pita... Piruj !!!"

Un vent fort souffla alors dans la pièce. L'effet à la fin de l'incantation fut immédiat : Ryusaki ferma cette porte pour qu'elle arrête de claquer et de lui donner de faux espoirs. Bon. Si même cela ne marchait pas, qu'est ce qui marcherait? Ryusaki n'en avait strictement aucune idée, et lança un regard suppliant vers la madame qui le regardait. Un regard suppliant, et un grognement d'estomac.

"Ca marche paaaaaas... Et puis... Raaah, j'ai faim, j'ai faim, j'ai faim !"

Et derrière Ryusaki, un petit pouf se fit entendre, l'heptadécacle s'illumina, un petit nuage de fumée se forma au centre... Et un petit lapin en peluche rose en sortit.