Une petite crêpe?

Je bâillai. J’étais assise sur un banc, dans le parc de Nara. Shanku était installée à côté de moi, cachée sous ma sacoche.
Je bâillai à nouveau.  J’étais fatiguée, aujourd’hui. Alors pourquoi être venue ici, à l’autre bout de la ville, par rapport au pensionnat. Parce que j’avais eu envie de découvrir le jardin public de Nara. Et, pour dire vrai, je n’étais absolument pas déçue. Il était presque aussi beau que le jardin du lycée Tadakaï. Tout arboré, avec une petite pièce d’eau au milieu, sur laquelle se prélassaient des canards mandarins et des cygnes, ce parc respirait le calme et la quiétude. Au milieu de la grande pièce d’eau, il y avait une petite île encore plus arborée et sauvage, à laquelle on accédait grâce à un joli pont traditionnel. C’était là que je m’étais installée.

Mais il se faisait un peu tard et, fatiguée comme je l’étais, il me faudrait un peu plus de temps qu’à l’habitude pour rentrer.
Je me mis donc en route, Shanku dans mon sac pour ne pas qu’elle soit repérée.
Alors que j’allais reprendre le chemin que j’avais suivi dans le parc à mon arrivée, je sentis une odeur délicieuse, une bonne odeur de crêpe chaude.

Sentant l’eau me monter à la bouche, je pris dans la direction d’où venait la délicate senteur et j’arrivais très vite devant un stand de crêpes.
Je regardai les différents parfums proposés. Il y en avait vraiment pour tous les goûts.
Je finis toutefois par me décider et m’approchai du vendeur pour en acheter une au coulis de chocolat noir.

Je dus toutefois attendre un peu car il y avait pas mal de monde qui faisait la queue pour une crêpe. Il faut toutefois préciser que cet établissement était assez réputé en ville.
Je pris donc mon mal en patience et attendis, comme tout le monde.

Une petite crêpe?

Je sentis un petit choc dans ma jambe droite. Intriguée, je tournai la tête et vis… un petit panda tout mignon !

-Bonjour, toi…

Mais sa maîtresse arriva et le prit dans ses bras en s’excusant de la conduite de son petit familier.
Je lui fis un grand sourire.

-Ce n’est rien. Je n’ai pas l’habitude de voir des bébés panda; c’est si mignon.

Puis j’ajoutai, en baissant la voix et en lui faisant un petit clin d’œil:

-Vous venez aussi du pensionnat Tadakaï, n’est-ce pas ?

Reprenant une intonation normale je continuais :

-Je m’appelle Anko Iwanishi, je suis en première année.

Rien ne me permettait d’être vraiment certaine que la jeune fille qui m’avait abordée avec son petit panda mignon venait vraiment du pensionnat pour mages. Toutefois, une série d’indice me menait vers cette conclusion. En général, un mage sent quand il a affaire à un autre mage. C’était ce qu’on nous avait expliqué en début d’année. L’espèce de drôle d’impression qu’on a en croisant certaines personnes dans la rue.

Shanku commença à se débattre dans mon sac, me réclamant mentalement de la laisser voir le petit panda. J’eus peur que les gens autour remarquent ces mouvements insolites de mon sac et ne commencent à se poser des questions mais, bien heureusement, personne n’y prêtait attention.
Je me détendis un peu et passai ma main dans ma sacoche pour gratouiller la tête de ma dragonne qui se calma un peu.

-Vous voulez manger une crêpe avec moi ?

Une petit crêpe?

Je ne m’étais donc pas trompée, cette jeune fille à l’air gentil venait bel et bien du pensionnat Tadakai.
Elle tenait toujours son petit panda adorable dans les bras. Akutty, comme elle l’avait présenté.
La file diminuait peu à peu, comme les gens repartaient avec leurs crêpes.
Shanku s’était remise à bouger et les gratouilles que je lui prodiguait ne parvenaient plus à la calmer. Elle n’avait qu’une envie : voir le petit panda.

-Ah, dans mon sac… Il y a ma dragonne, Shanku. Elle est bien gentille mais elle est impatiente et brûle d’envie de faire un câlin à Akutty. Malheureusement, je ne peux pas la lâcher comme ça dans la rue…

A force d’exhortations à patience, je parvins à obtenir qu’elle cesse de bouger, sous condition qu’on trouverait un coin à l’écart pour que je puisse la faire sortir de ma sacoche.
Soupirant de soulagement, je me rendis compte que nous nous trouvions maintenant devant le crêpier.
Souriant à nouveau à ma compagne puisqu’elle acceptait ma proposition, je me mis en devoir d’analyser de plus près les compositions de crêpes proposées. Argh… C’était dur… tant de parfums si différents et appétissants… mon choix simple de tout-à l’heure s’effaça de ma pensée et je choisis en salivant d’avance, une crêpe au litchi et au chocolat fondu.
Je déposai mon dû sur le comptoir, puis me tournai vers Hinata qui m’en offrit une deuxième.

-Merci beaucoup, Hinata !

Nous nous éloignâmes du stand de crêpes, qui ne désemplissait pas, nos délicieuses sucreries à la main.

-Tout-à l’heure, j’ai repéré dans le parc un coin super où personne ne vient jamais. Si on y va, je pourrais libérer Shanku pour quelque temps.

J’attaquai alors ma crêpe. Délicieuse. Ce n’était vraiment pas pour rien que cette crêperie était réputée dans tout Nara et ses environs.

-Tu préfère le parc de Nara ou bien le jardin de Tadakaï, Hinata ? Je crois pour ma part que je préfère le vaste domaine du pensionnat mais j’aime bien passer par ici quand je viens en ville. C’est un endroit calme dans la cohue de la ville. Je n’aime pas trop la cohue et la foule.

J’étais vraiment étonnée d’arriver à parler avec elle avec autant de facilité alors qu’on ne se connaissait pas. Ma timidité extrême aurait dû m’empêcher de parler sans bafouiller et rougir… Mais là, nulle trace de tout ceci.
C’était un peu comme si je la connaissais depuis longtemps. Ou alors peut-être que nous n’étions pas si différentes, toutes les deux, et que cette facilité d’expression était due à cela ?