| Sujet: Quand Shirotai exerce son art... Jeu 17 Juil - 22:53 | |
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Voilà, je... mon but c'est de devenir auteur écrivain. Du coup, je m'entraîne beaucoup. Et j'essaye de partager un peu ce que j'écris. En l’occurrence, mon projet le plus récent (et par conséquence celui dont j'ai le moins honte XD). Donc, je vais poster les deux premières parties, et sûrement reprendre l'écriture de la troisième si qui que ce soit est intéressé par la suite. - Une Torche dans la nuit - Partie 1:
Les barricades tremblaient, et le ciel était plus sombre qu'à son habitude. Ses teintes de gris feignaient désormais le noir, repoussées de l'obscurité totale par les lumières cramoisie du campement. Le soleil était un privilège que les Dépi avaient perdu depuis plusieurs générations. Passé sous la volonté de l'ennemi, sa tâche était désormais effectuée par myriade de feux de-ça de-là des installations. Seule la lune passait encore à travers ces cieux de cendre, pour présager l'arrivée des Reni en reflétant leur astre approchant. La veille, elle était apparue. Et en cette soirée, elle était recouverte depuis des heures par les sombres nuages mis en place par l'ennemi, eux aussi ralliés à leur cause. Le sol était lui aussi secoué. Pas par décision de qui que ce soit, bien qu'il existait certainement quelqu'un capable de le faire obéir, quelque part. C'était simplement la cavalerie approchante qui faisait frémir la poussière. Et l'eau tomba du ciel. Et elle devint glace. Les grêlons frappaient déjà avec violence la tôle, le métal et les troupes. La bataille était perdue d'avance, et sous peu la guerre se terminerait. Pas par l'éradication de la dernière base Dépi, non. Par la trahison du plus puissant Reni ayant jamais existé.
L'enfant était à moitié assoupi, assit derrière son père qui lui menait la charge. Ce n'était pas la situation induisant au repos, loin de là, mais la fatigue d'un long voyage. L'idée avait été discutée longuement. Dans un monde où les symboles s'imposent à la réalité, rien ne détrônerait l'enfant-roi, au front pour éradiquer le dernier bastion Dépi. Et si le voyage avait duré des jours, la voie ouverte par un soleil voyageur en constant zénith, et si les soldats étaient tout aussi épuisés, à cause d'un rythme de sommeil brutalement irrégulier... c'était un prix à payer, pour restaurer sa gloire à une civilisation agonisante, pour survivre au poison injecté à cette Humanité. Des siècles auparavant, le monde avait été condamné. Ils avaient reçu le poison céleste, cette touche de divinité transformant idées en réalités, et réalités en idées. Et des années de guerres pour son contrôle plus tard, il restait peu de choses indépendantes d'une quelconque volonté. Le bas-peuple déterminait la nature de chaque chose, imaginait et croyait aux puissances animant un monde sans quoi commun. Et de rares élus canalisaient ces croyances, ces Concepts. Et la réalité s'en voyait changée, et ces puissances répondaient aux désirs de leurs Réceptacles. Et le plus puissant d'entre eux se nommait Es'ren.
Les troupes s'entrechoquèrent, les barrières tombant rapidement. Le soleil aveuglait les défenseurs Dépi, peu habitués à sa clarté. La grêle avait cessé, non sans avoir accompli son devoir. Les plus féroces soldats étaient démoralisés avant même la bataille. L'étalon blanc de Or'ren et son fils fendit la ligne de front, comme indifférent aux combats sanglants. La route vers la Cathédrale était jonchée d'obstacles, mais ce n'était rien que la monture ne savait sauter. Et très vite, la bête mit fin à son galop, devant les marches du lieu de culte. Or'ren descendit le premier, la main sur son épée. Quelques yeux scrutaient la scène depuis les bâtiments délabrés, mais aucune menace n'était présente. Il fit descendre Es'ren, déjà réveillé par les sauts successifs effectués pour arriver jusqu'ici. Ce n'était qu'un enfant, il ne comprenait pas exactement ce qui lui arrivait. Il ne pouvait qu'admirer, bouche-bée, l'architecture grandiose de la Cathédrale. « Elle date d'avant la guerre, tu sais. Vois ce que nous sachions créer, avant que les idées ne deviennent des armes. L'art. » Main dans la main, ils entrèrent dans la grande salle. Les vitraux, pour la première fois depuis des décennies, filtraient les rayons du soleil en une multitude de couleurs. Le Grand Prêtre Dépi lui-même semblait bouleversé par la beauté de la chose. Derrière lui, sur l'autel, se trouvait une coupe dorée, dont le contenu luisait du reflet des teintes ambiantes. « Je suppose qu'il s'agit de ma garanti. Vous n'étiez pas forcé de l'entreposer ainsi. J'apprécie le geste, mais là d'où nous venons, ce genre de rituel n'est guère pratiqué. » exprima Or'ren. Le Grand Prêtre sourit. Il était heureux de constater que l'homme en face de lui savait rester aimable et respectueux, même dans ces conditions. Il expliqua que la coupe avait toujours été là, depuis sa création. Il s'agissait d'un Concept si lourd à porter que même son créateur n'avait su le déplacer. Mais il y avait deux Réceptacles capables d'assumer un poids pareil, les deux plus puissants. Or'ren et Es'ren. « L'Immortalité. Avec ceci, je m'engage à combattre pour votre cause. » Es'ren regarda son père passer à côté du Grand Prêtre, puis soulever la coupe dorée, non sans une certaine surprise face à son poids. Malgré une pleine conscience de l'importance de la chose, et sa capacité à la soutenir, cela restait plus démesuré que ce à quoi il s'attendait. Le jeune garçon regarda le sol, puis suivit les ombres des piliers jusqu'au plafond. La situation le dépassait, et l'architecture l'intéressait d'avantage. « Ces traîtres désiraient se débarrasser des Réceptacles aussitôt la guerre terminée. Cette histoire d'enfant roi n'est qu'un mensonge pour eux, pour motiver les troupes. En vérité, ils ne veulent que retrouver le monde d'avant. » « C'est assez commun à votre peuple, n'est-il pas ? » commenta l'homme d'église. Or'ren se retourna magistralement, sa cape rougeoyante se gonflant du courant d'air brusque, et se rabaissant lentement. Il marcha vers son fils, passant indifféremment à côté de son interlocuteur principal. Un genou au sol, il fit face au garçon. « N'espérez pas non plus que mon allégeance va à votre soit-disant prophète. Le Premier Réceptacle n'avait d'yeux que pour la destruction de notre monde, pour nourrir ce dieu si lointain. » Le père pris la main de son enfant entre les siennes, et un flot d'énergie les entoura. La coupe, posée au sol entre les deux, se vida peu à peu. « Es'ren, je te fait don des forces qui m'ont animé jusqu'ici. Reçois le Concept du Soleil. J'ai un fardeau plus lourd à porter, afin qu'un jour, tu deviennes notre roi à tous. Tu vas rester ici, dans la Cathédrale. Je reviens d'ici ce soir. Je t'apprendrais à le faire venir, d'ailleurs. Nous n'avons pas eu une bonne nuit depuis un moment. » Or'ren sourit et se releva, suivi du regard par l'enfant silencieux. Il se dirigea vers l'entrée, et dégaina son épée. Les troupes Reni étaient déjà proches. Les grandes portes de bois sculpté se refermèrent derrière lui, et peu après, on entendit son cheval galoper.
Es'ren regarda le Grand Prêtre. Le silence était d'autant plus pesant que l'homme ne savait pas quoi dire à un enfant d'une telle importance. Après quelques secondes, il le vit simplement ramasser la coupe vide et la reposer sur l'autel. « Ça doit être tout beau quand maman viendra».
- Une Torche dans la nuit - Partie 2:
Dehors, le soleil flamboyait toujours, et les rues restaient vides. Les Dépi locaux n'osaient toujours pas poser le pieds hors de leurs demeures. Es'ren regardait l'ensemble de la ville depuis le balcon du clocher. Mis-à part la place de la Cathédrale, l'endroit était tout à fait similaire aux campements Reni. Des tentes, des cabanes, et des ruines aménagées. La misère y était tout aussi présente qu'ailleurs. Il n'avait rien connu d'autre jusqu'ici, et son jeune âge ne lui permettait pas d'imaginer une quelconque autre façon de vivre. Mais l'édifice religieux opposait un fort contraste avec le reste du monde. Aucune pierre n'était ébréchée, aucune poussière n'osait se poser sur les surfaces... pourtant, le Grand Prêtre était seul en ces lieux. L'idée qu'il puisse entretenir le bâtiment entier par lui-même n'était pas raisonnable. Soit. Ce n'était qu'un détails pour l'enfant. Ses chevilles tremblaient, fatiguées de supporter son poids pour quelques centimètres de plus, sans quoi il ne pourrait observer par dessus la rambarde. Il s'assit au sol, adossé à cette dernière, et ferma les yeux en silence. Le soleil s'imposait systématiquement dans son imaginaire, comme une tâche indélébile dans le paysage de son esprit. Au moindre égarement, il entendait les voix des croyants, qui qu'ils soient. Porter un Concept à un si jeune âge était rare. Bien sûr, comme tous les Réceptacles, il avait reçu un entraînement basique. Mais ce soleil était lourd et puissant. Les complaintes l'étaient tout autant. À travers l'hémisphère, beaucoup s'étonnaient de la disparition soudaine du jour. Après tout, la nouvelle de la trahison de Or'ren n'était pas encore parvenu jusque là. Et si ce dernier savait maintenir l'astre pour un hémisphère entier, ce n'était pas le cas de son fils. Il était jeune, et petit, et innocent. La grandeur du monde au-delà de l'horizon, et l'ampleur de sa souffrance, lui étaient inconnues. Il ne se passait pas un jour sans qu'une prière soit adressée à quoique ce soit. Si ça avait un nom, on pouvait le conceptualiser. Et dans cette guerre sans fin, la moindre arme potentielle était à prendre. Le soleil, le vent, l'herbe vibrant à son rythme, et la douce chaleur d'un été paisible. Cela n'avait jamais existé pour la moindre personne de cette génération, et de quelques précédentes. Mais au cœur de la lumière aveuglante de son Concept, Es'ren pouvait les entendre. Les prières d’antan, les souhaits et les souvenirs heureux liés à l'astre, à toutes les journées de joie qu'il prodiguait. Avant qu'il ne serve plus d'autre rôle que celui d'une arme.
Même maintenant, l'enfant peinait à le voir. Il n'avait jamais pu le contempler, même chez les Reni. Ou du moins, il n'avait jamais pu voir autre chose qu'une source de lumière. Désormais, il avait conscience de la beauté qu'on pouvait y trouver. Mais les fumées de la bataille au loin entravaient le ciel d'un manteau de cendres. Son soupire fut long et profond.
« C'est donc ici que tu te caches. Belle vue, n'est-ce pas ? » interrompit le Grand Prêtre. Le jeune garçon baissa son regard, jusqu'alors tourné vers le ciel. Même s'il était assit en direction de l'escalier, il avait été trop concentré pour le voir venir. « Hm. » Il n'était pas loquasse, et cela mettait encore plus l'homme d'église mal à l'aise. Lui non plus n'avait jamais été doué pour la discussion, encore moins avec des enfants. De plus, le moindre prêchi-prêcha à son égard lui vaudrait la colère du père. « Tu t'appelles Es'ren, c'est ça ? Je suis le Grand Prêtre Dépi. On ne s'était pas présenté. » dit-il, agrémentant sa remarque d'un sourire. « Tu t'appelles vraiment le Grand Prêtre ? Comment tu l'écris ? » demanda le petit. L'idée l'intriguait. La grande majorité des noms se constituaient de 2 syllabes et pouvaient s'écrire de manière simple. De fait, l'hypothèse qu'il s'agissait d'un réel nom le surprenait. L'homme s'expliqua donc, toujours souriant. « Non, pas vraiment. C'est mon rôle, à vrai dire. Ça veut dire que je vit dans la Cathédrale et que je raconte des histoires sur l’Émissaire, le premier Réceptacle. Et aussi que personne n'a le droit de m'appeler par mon nom, seulement par mon rôle. » L'expression de l'enfant passa de la surprise à la réflexion. Les pensées s'enchaînèrent, mais n'aboutirent à rien de constructif. Il changea de sujet. « Papa revient quand ? » L'homme s'approcha de la rambarde, contemplant au loin. Au bout de la grande rue, les minuscules silhouette continuaient de s'affronter. Or'ren était déjà parti depuis quelques heures, mais les troupes Reni continuaient d'affluer. Mais désormais, les barricades tenaient bon. Le nombre de soldats arrivant à leur niveau était tant amoindri que les quelques défenseurs à disposition pouvaient les repousser. « Sous peu. Il a presque terminé sa tâche. » « Et Maman arrive quand ? » Le prêtre dégluti. Il n'y avait aucune assurance qu'elle réussirait à atteindre le camps sans être attrapée par les Reni. Le sujet avait été particulièrement tendu lors de la mise en place du plan avec Or'ren. Mais c'était un risque qu'elle avait accepté, pour le bien de la famille. Même si elle-même n'était pas Réceptacle, et n'avait pas autant à perdre que son époux et son fils, elle avait choisi de les soutenir. Pas seulement par amour pour ces deux-là, mais aussi pour celui qu'elle portait encore. C'est aussi pourquoi elle n'avait pas pu faire le voyage avec eux. L'accouchement et le lancement de l'attaque sur la Cathédrale coïncidaient mal. Mais désormais, elle avait dû donné naissance, et avoir fuit aussitôt avec le nouveau-né. « Elle est bien plus féroce que milles guerriers comme moi. Elle nous rejoindra en un morceau. » avait assuré Or'ren. « Tu vas avoir un petit-frère, n'est-ce pas ? Dès qu'il sera prêt à voyager, je suis certain que ta maman se mettra en route aussitôt. Juste un peu de patience. »
Le jeune bébé dans un bras, fixement attaché, Ly'ora marchait assurément à travers le camps. Elle sortait tout juste de la tente d'infirmerie, dans laquelle reposaient maintenant 8 corps inconscients. Un médecin gentil mais compromettant, une infirmière un peu trop bruyante, et 6 gardes trop alertes pour leur bien-être. Il n'y avait pas mort d'homme, mais il valait mieux partir le plus vite possible. Ses provisions étaient déjà préparées, et sa monture sellée. Le temps de monter sur la bête, le ciel était passé de azur à obscure. « J'ai bien fait de me dépêcher, mes gaillards se sont déjà mis au boulot. » Dans le chaos et l'étonnement, la jeune femme en profita pour cavaler hors du village, presque inaperçue. Sans un convoi militaire à attendre, le voyage qui avait pris des jours à ces messieurs ne prendrait que des heures. Encore fallait-il ne pas se faire repérer.
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