Une forte odeur de chocolat brûlé imprégnait l’air alors que sous leurs pas l’herbe verte au délicieux goût de pâte d’amande s’était noircie, carbonisée par le souffle brûlant de l’immense créature aux écailles orangés qui les poursuivait. L’œil rouge, le lézard avait des airs de dragon et comme pour confirmer sa probable parenté aux serpents ailés des contes de ses narines émanait une fumée sombre et peu avenante, semblable aux vapeurs d’un feu de bois. Le gosier enflammé ne demandait qu’à cracher incendie et causer saccage dans la serre sucrée désormais lieu de chaos. Avec un frémissement d’horreur Kobato tira Rebekah derrière un arbre coulis caramel. Les branches longues de la plante -lointaine cousine du sol pleureur- parviendraient à les cacher pour quelques minutes au moins. Les feuillages effleuraient leurs peaux avec douceur. C’était un frôlement rassurant et Kobato se demanda pendant une seconde si l’arbre pouvait penser.

-Je suis tellement désolée, Rebekah. -répéta-t-elle dans un silencieux murmure.-

Au loin la carcasse d’un des muffins de Kobato gisait à moitié-mangé. A sa vue les prunelles chocolat de l’académicienne s’emplirent de larmes mal contenues. C’était encore un échec complet. Invitée par son amie Hybride de première année à la serre gourmande, la magicienne avait entamé avec une joie immense son premier voyage à Hybridland. Les contrées y étaient d’un vert pur, le bleu d’un azur splendide et le soleil aussi rayonnant que jamais. Les gardiens et producteurs du jardin sucré les avaient accueillis avec gentillesse et maints sourires. Leur magie était fascinante, elle ressemblait trait pour trait à celle de Kobato qui avait cru bon de leur faire partager ses talents. La principale différence était que ces derniers ne transformaient pas les gens en monstre à coup de cup-cakes. L’adolescente se mordit vivement l’intérieur de la joue. Si par sa faute, les hybrides ne retrouvaient pas leurs formes normales et faisait un massacre, elle ne se pardonnerait pas ce désastre. Même son suicide ne suffirait pas à racheter sa faute.

Frr….

Les lianes caramel vinrent s’enrouler autour de leurs poignets, humides et froides.  Tout près le pas lourd d’un gros grizzly noir aux dents acérées et au dos couverts d’aiguilles pareilles aux piques d’un hérisson se fit entendre. L’imposant mammifère reniflait l’air avec intensité. Il était en train de les pister et son nez expert aurait tôt fait de retrouver leurs traces. Déglutissant, Kobato enjoignit sa camarade blonde à reculer en direction du tronc dont les grands hameaux offriraient sans doute la cachette la plus sûr.

-On devrait essayer de monter…il… -geignit-elle alors que l’ours brun tournait sa tête en leur direction. Il hésita fit un pas en avant, en arrière.- il hésite ? -s’enquit la jeune fille avec espoir.-

CRAC

Le talon de la chaussure de Kobato plia une branche morte et la brisa. Elle eut un regard pour Rebekah. L’ours se mit à courir et hurler suivit par la salamandre. Elle cria en retour.

-COUUUUURS, REBEKAHH COURRRRS !!!!

Elles se retrouvaient deux face à des gueules pleines de crocs.

Elle se voyait déjà mourir avalée toute crue et d'une seule bouchée par l'imposante salamandre, quand la poigne de monsieur Nightblade s'était refermée sur ses hanches. Tremblante et en sueur, elle peina à articuler des mots cohérents alors qu'il réclamait des explications. Elle était entrain de vivre la frayeur de sa vie et son l'angoisse martelait encore trop fort -tant dans son ventre que dans sa tête- pour qu'elle ne parvienne à s'exprimer comme il faut. Hoquetant, elle lâcha un minuscule « professeur » soulagé, mais aussi coupable. Kobato avait déjà eu l'occasion d'avoir quelques cours sous la direction du professeur d'histoire-géographie, cependant elle ne le connaissait guère et elle était égoïstement effrayée de la punition qui allait l'attendre à la sortie de cet enfer. S'ils s'en sortaient. Rebekah donna à leur enseignant les mots qui manquaient à l'adolescente. Elle trouva toutefois, le courage de rajouter d'un ton éteint :

-Ma magie a dératé, je ne pensais pas....

Kobato fut coupée par des bruits gluants. Déjà un nouveau monstre apparaissait, croisement entre une pieuvre et un autre animal dont elle n'aurait pas su donner la définition. La pauvre trembla de la tête au pied. Elle était tout sauf combative. Kobato était trop frêle et elle ne maniait aucune arme, sans parler de sa maladresse insurmontable. Aussi, quand Rebekah lui asséna de lui faire la courte échelle, la magicienne eut un moment de panique. Son pied glissa et elle faillit bien ne pas réceptionner la jolie blonde comme il faut. Heureusement, le hasard voulut que pour une fois elle ne perde pas l'équilibre. Cela permit à sa camarade de récupérer un bonbon rare et réputé que les hybrides de la serre veillaient à protéger. Alors que la jeune fille se transformer un cri fendit l'air. Cette fois, c'est un rapace qui se précipita sur Kobato la faisant vivement s'accroupir à terre. Les mains moites, elle mit une minute à remarquer que Rebekah venait d'enfermer la créature dans une boite sombre, aux ombres mouvantes. Avec un petit regard admiratif sur la jeune fille, puis un énième désolée accordé à Monsieur Nightblade, Kobato répondit d'une petite voix fluette.

-Je n'en ai aucune idée, ça peut être des jours comme deux minutes. Je suis...

Elle n'eut pas le temps de s'exprimer, qu'un immense vers de terre sortie de terre et lui enserra la taille. Kobato leva ses grands iris noisettes sur son professeur et sur la jeune fille blonde. Sa bouche s'ouvrit. Sa lèvre inférieure trembla. Ses pupilles s'écarquillèrent. Et le monstre la remporta dans le fond du trou.

-Monsieur Nightblade !!!!! Rebekah !!!!!

Le hurlement de Kobato fut perçant. Ses doigts frôlèrent ceux de son professeur, mais déjà elle se retrouvait dans le tunnel de terre en chocolat. Au moins celui-ci avait une odeur de sucrée. Paniquée Kobato tenta de taper à coup de poings, l'immonde mutant qui l’entraînait toujours plus bas. La lumière était loin, les silhouettes des deux autres magiciens pas plus qu'un reflet indistinct désormais. Elle se sentait perdue, faible et une nouvelle vague de larmes la prit qu'elle refoula tant que mal. C'est rageusement que Kobato mordit dans le vers de terre à sang. L'ancien hybride poussa un couinement et se mit à accélérer. Le boyau déboucha bientôt dans une galerie et le monstre la jeta à l'intérieur. C'était une petite cavité à l'espace restreint. Kobato déglutit. C'était vraiment le pire jour de sa vie.

(HRP : vraiment désolée du retard TOT)